Quick : sept ans d'amour vache

La seule vraie marque de fast-food belge est repassée sous pavillon belge en 2016. Quick a alors choisi Happiness, à l'issue d'une consultation d'agences classique. Compte rendu d'un entretien croisé animé avec Dirk Lammens, Head of Marketing de Quick, et Karen Corrigan, CEO de Happiness Anywhere et présidente de l'ACC. Le sujet ? Non pas l'Effie d'or qu'ils ont remporté après sept ans. Non pas eux-mêmes. Mais plutôt leur collaboration. Les lignes de validation courtes, les pitchs quotidiens, la véritable approche à 360° et les appels téléphoniques parfois journaliers. La résolution immédiate des problèmes, la vigilance mutuelle et la différence entre « happiness », « happy stress » et « sadness ». Sans oublier leur entente cordiale. Six jours après l'interview est tombée l'annonce de cette nouvelle dont personne n'avait explicitement parlé le mercredi précédent : en plus de Quick, Burger Brands confie désormais aussi Burger King aux bons soins de Happiness.

Les propriétaires de la marque

Dirk travaille depuis longtemps pour Burger Brands et donc pour Quick. Kevin Derycke, CEO, était là lorsque Quick a été relancé en Belgique. Ils forment ensemble la mémoire collective de la marque. Dirk : « Depuis que nous sommes à nouveau 100 % belges, nous gérons nous-mêmes la marque. » Karen : « Le succès de Quick repose notamment sur des lignes de validation très courtes. David Ogilvy a dit un jour : "Cherchez vos parcs dans toutes vos villes. Vous ne trouverez pas de statues de comités." Du fait de nos nombreuses années de collaboration, une confiance stratégique de base s'est installée. Il peut donc y avoir une tension saine entre l'annonceur et l'agence : l'agence pousse et repousse parfois les limites, sans avoir peur de faire fausse route, et l'annonceur a tendance à freiner. » Dirk : « Les équipes de Happiness échangent avec mes équipes et, si la décision doit venir de plus haut, nous sommes là. En cas d'ambiguïté, Karen ou moi prenons le téléphone et réglons le problème immédiatement. Notre chaîne accueille plusieurs centaines de clients midi et soir dans chacun de ses restaurants. Nous ne sommes toutefois pas les seuls sur le marché. Les équipes de Happiness et de Quick restent donc sur le qui-vive. Ce n'est jamais calme. »

Quick : sept ans d'amour vache

Une véritable approche à 360°

Karen : « Pour ce qui est de l'histoire de la marque proprement dite, nous prenons le temps. Nous avons acquis une sorte de rythme ces sept dernières années. » Dirk : « Cela a pris du temps et nous nous adaptons au fur et à mesure, à force d'expérience et de suivi minutieux. » Karen : « C'est ainsi que le travail gagne en profondeur, qu'il devient plus essentiel et que nous orientons un nombre croissant de nos activités en ce sens. Nous sommes passés à un 360° presque complet en termes de communication, mais aussi en termes de marketing. » Dirk : « Aujourd'hui, tous les éléments se renforcent mutuellement. Une approche à 360° demande du temps : il y a le CRM, les réseaux sociaux, la ligne hiérarchique, les restaurants et, surtout, les produits. Personne n'amorce un 360° à partir de rien. » Karen : « La communication en soi reste souvent esthétique, cosmétique. Ce qui a permis de boucler la boucle, c'est la décision ambitieuse de Quick d'intégrer ses produits dans l'histoire de la marque. » Dirk : « Nous partons désormais toujours d'une idée, en cocréation avec l'agence. Qu'est-ce qui est véritablement belge et pertinent pour Quick ? L'idée passe par la R&D, qui évalue avec le Brand Manager ce qui évoque le carnaval, par exemple. Cela peut prendre la forme de toppings colorés ou de "guirlandes de carottes". L'idée est ensuite testée et, si elle fonctionne, si le goût est au rendez-vous et si Supply confirme que tous les ingrédients sont disponibles, le produit est présenté au comité de direction. Il peut ensuite être commercialisé. Je ne connais pas d'autre chaîne qui travaille de cette manière. »

Un grain de folie

Karen : « Au début, nous savions que nous devions "craquer" les codes belges, mais de là à aussi jouer un rôle dans le développement de produit, en tant qu'agence… À l'été 2018, nous nous sommes dit : "Et si nous partions d'un concept ?" Depuis lors, le produit fait partie intégrante de notre processus créatif. » Dirk : « Prenons l'exemple du burger du chef belge Loïc van Impe, du burger-gaufre, du Carnival, du Cycliste ou encore du Baron (avec sa sauce à la bière). Le produit incarne la marque. » L'hypothèse selon laquelle seule l'agence peut amener des idées décalées fait réagir Dirk : « Pour notre défense (ou pas), nous avons aussi des idées un peu folles. Le fait que l'agence dise… » Karen le coupe : « Ils sont devenus fous ? » Dirk (d'un ton sec) : « C'est un échange d'idées folles. » Karen : « Et nous ne nous demandons pas qui a trouvé tel ou tel concept. L'idée est là, peu importe comment elle a germé. Nous nous écoutons aussi très attentivement les uns les autres. Nous organisons des réunions à cet effet. Quant à savoir qui a eu l'idée… Tant que la sauce prend (elle rit du jeu de mots) ! »

Des « vœux de mariage » en écossais

Karen : « J'ai formulé mes "vœux de mariage" en écossais. J'en retiens (en parlant avec un fort accent écossais) "for betterr and for worrse, for richerr and for poorrerr, till death us parrt". Les deux premiers éléments sont vrais. Nous faisons tellement de choses ensemble qu'il est presque impossible que tout se déroule toujours sans encombre. Nous partageons aussi les déconvenues, et pas seulement la gloire. » Dirk : « Nous adoptons une approche transparente à cet égard. C'est dans notre nature. Les équipes changent des deux côtés. Quelqu'un ne convient pas ? Nous rectifions le tir. Un problème s'est posé ? D'accord. Lequel ? D'accord. Que pouvons-nous faire ? D'accord. Ce n'est pas parce que les résultats sont bons que nous nous reposons sur nos lauriers. Nous nous maintenons vraiment en éveil l'un l'autre. » Karen confirme : « C'est toujours la dernière performance qu'on retient. Happiness a pleinement conscience de l'ambition de Kevin et Dirk. Nous savons qu'en tant qu'agence locale, nous devons mériter la confiance de notre client jour après jour. En cas de frictions, nous prenons nos responsabilités et résolvons les problèmes ensemble. Si nous identifions des zones grises, nous intervenons. » (hilarité générale) Quand on lui demande si c'est exact, Dirk esquisse un sourire : « Je ne ferai aucun commentaire à ce sujet. Pour moi, il y a très peu de zones grises. » Je relève donc trois niveaux de communication : la communication B2C classique via les réseaux sociaux et les médias ; la communication dans les restaurants (plus précisément l'accueil et les produits) et la communication entre Quick et Happiness. Karen : « La dernière a son importance. Les réunions planifiées ont lieu, même quand il n'y a aucun point à l'ordre du jour. À notre niveau (n'est-ce pas, Dirk ?), nous voyons venir les problèmes à l'avance. Nous les désamorçons donc rapidement et efficacement. Un véritable gain de temps ! »

Un pitch par jour

À la question de savoir si Quick n'a pas tendance à organiser un pitch à la moindre occasion, Dirk répond du tac au tac : « C'est un réflexe permanent. » Karen : « Oui, c'est vrai. » Dirk : « Je plaisantais, mais Karen n'a pas tort. Quick et Happiness seront toujours jugés sur la base de leur dernière campagne. Nous vérifions donc tout. Était-ce pertinent ? Était-ce moins bon ? Devons-nous apporter des ajustements ? S'ensuit non pas un pitch, mais bien un effort de vigilance mutuelle. En réalité, nous organisons des pitchs au quotidien. » Karen : « Pour chaque campagne de marque, le message adressé à notre équipe est le suivant : "Hey, it's new business !" Nous avons beau entretenir une relation assez étroite, il y a une grande confiance mutuelle et je pense même que nous nous apprécions, cela n'empêche en rien d'organiser un pitch. C'est une question de professionnalisme. » Dirk : « Il faut dire que, quand nous ouvrons les portes le matin, nous voyons qui vient manger dans nos restaurants. C'est une évaluation permanente. C'est inscrit dans notre ADN et nous attendons la même chose de nos agences. » Karen : « La différence entre une pression saine et une pression malsaine peut paraître insaisissable. Où est la limite ? Je me dis parfois : "Dirk, nous sommes passés de 'happy stress' à 'sadness'". Il s'agit en fait souvent de malentendus. Nous discutons ensemble et résolvons le problème. »

Le combat inverse

Dirk : « Si je participe à cette interview, c'est parce que chez Quick, nous sommes véritablement honorés d'avoir remporté un Effie d'or. » Karen : « Le plus grand des honneurs. » Dirk : « Il est question de la marque et c'est mieux quand Karen et moi sommes ensemble. Mais ne vous méprenez pas, je suis bien conscient que nous ne sommes pas un client facile. » Karen : « Strict, mais juste. » Dirk : « Je suis là pour développer la marque. Si Happiness nous suit, c'est parce qu'après toutes ces années, ils ont appris à aimer la marque Quick. » Karen : « Notre collaboration fonctionne parce qu'elle repose sur une combinaison saine : il s'agit de placer la barre haut, tout en s'amusant, même si c'est du sérieux. »

Dirk résume comme suit le dossier couronné d'un Effie d'or : « La chaîne belge de hamburgers, au goût typiquement belge. Depuis plus de 53 ans. Ce que j'apprécie beaucoup, c'est que quand nous avons discuté de la marque au début (et nous le faisons encore aujourd'hui d'ailleurs), il n'a pas été question de l'USP ou de questions de ce genre. Happiness nous a demandé : "Pourquoi êtes-vous là ? Que manquerait-il si Quick n'était pas là ?" En répondant correctement à cette question, vous avez déjà fait une bonne partie du chemin. Et si vous parvenez à le faire comprendre à vos clients, vous pouvez prétendre à un Gold Effie, voire à un Grand Effie. » Karen : « Frans Cuypers, stratège chez Happiness et rédacteur du dossier, a écrit dans le dossier : "Nous avons transformé un combat que nous n'aurions jamais pu remporter en un combat que les autres ne pourront plus jamais gagner." » Dirk : « Le fait que les insights étaient justes à l'époque les rend exploitables à long terme. En tant qu'entreprise belge, Quick connaît mieux que personne les goûts des Belges. Nous sommes les seuls à pouvoir proposer de manière crédible un véritable hamburger belge. »

Josephine Overeem

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