Academic inspiration :
qui croit au marketing croit à la magie


Les chiffres sont évidemment essentiels pour élever le marketing à un niveau supérieur. Mais ils ne suffisent pas. Els Raemdonck, professeure à la Erasmushogeschool et conseillère stratégique chez Happiness, croit à la magie… Car l'efficacité nécessite de la magie.

Je lis actuellement un livre extrêmement intéressant. Le titre ? « Alchemy. The surprising power of ideas that don't make sense » de Rory Sutherland. Dans cet ouvrage, Rory Sutherland embarque le lecteur dans toutes sortes d'histoires ; il remonte même jusqu'aux récits du Moyen Âge. Au fil des pages, il démontre l'essence de notre profession : croire au pouvoir de la magie. Ou comment des choses qui semblent insensées à première vue mènent à de grands succès.

Academic inspiration : qui croit au marketing croit à la magie

Le postulat de départ : « les gens n'accordent pas de valeur aux choses, mais à leur signification ». Des exemples ? Le vin qui coule d'une bouteille lourde a plus de saveur que le vin qui sort d'une bouteille légère… Le dentifrice avec une ligne bleue au milieu est plus efficace qu'un dentifrice blanc ordinaire…

L'or vaut plus que l'argent

Au XIXe siècle, la princesse Marianne de Prusse est parvenue à convaincre les femmes de l'aristocratie d'échanger leurs bijoux en or contre des bijoux en argent pour gagner la guerre contre la France. Les joyaux en argent portaient la mention « Gold gab ich für Eisen » (« J'ai donné de l'or pour de l'argent »). La signification de l'argent a alors changé : les bijoux en or prouvaient que vous apparteniez à une famille riche ; leurs variantes en argent démontraient que vous étiez non seulement riche, mais aussi généreux et patriote.

Au XVIIIe siècle déjà, Frédéric Le Grand avait exploité la même magie pour promouvoir la pomme de terre, en prévision d'une potentielle famine due à une pénurie de pain. Les agriculteurs ne savaient rien de la pomme de terre, dont il n'était nulle part question dans la Bible. Après l'échec de la coercition, Frédéric Le Grand tenta la méthode de la séduction subtile en faisant planter des pommes de terre autour de son palais. Il annonça alors qu'elle était un mets royal, qui ne pouvait être dégusté que par les membres de la Maison royale. Avant de fermer les yeux sur quelques menus vols dans son potager. Le reste est passé à l'histoire : la pomme de terre est devenue un produit prisé et l'est encore aujourd'hui.

Morale de l'histoire : l'« élixir de rareté » fonctionne toujours  : il vous suffit de dire qu'une chose est rare et exclusive pour que chacun se l'arrache.

Pourquoi cette technique n'est-elle pas plus courante en marketing ?

Ces récits nous apprennent, une fois de plus, que le marketing est vieux comme le monde. Que l'homme n'est pas un être « logique », mais « psychologique ». Et que l'essence de notre métier consiste à donner à notre produit une dimension attrayante (et certainement pas toujours logique) pour ce même homme.

Pourquoi la magie n'opère-t-elle donc pas plus souvent en marketing ? La devise « Nothing great comes easy » prend ici tout son sens. La magie ne jaillit pas de nulle part. La magie exige beaucoup du marketeer. Elle demande de l'audace et des efforts. Elle nécessite d'oser continuer à se poser ces « bêtes questions enfantines ». Les questions que personne ne pose (plus) lors des réunions. Et surtout de continuer à trouver les véritables réponses, celles que tout le monde ne répète pas (par habitude). À ce sujet, Rory Sutherland fait référence à des réponses qui ne coulent pas de source à des questions telles que « pourquoi les gens mangent-ils plus de glaces en été ? » ou « pourquoi nous brossons-nous vraiment les dents ? ». Et, non, la réponse à ces questions n'est pas « pour se rafraîchir » ou « pour garder nos dents en bonne santé ».

Enfin et surtout, si nous voulons que la magie opère, nous devons parfois oser renoncer à notre penchant pour la sécurité des données et les arguments rationnels. Nous devons oser admettre que ceux-ci ne mènent pas toujours au succès. Concluons sur un passage intéressant : « In coming up with anything genuinely new, unconscious instinct, luck and simple random experimentation play a far greater part in the problem-solving process than we ever admit. Everything in life works this way. Business. Evolution by natural selection. Even science. »

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